Arfure, longtemps fut inconnue et discrète dans la ville. Elle se déplaçait invisiblement, par petit pas, toujours le long des murs.

Pourtant depuis quelques temps, on ne voit qu’elle. Elle passe dans la rue, on s’arrête et on en parle ; elle entre au théâtre, au cinéma, on se retourne et on se tait. On l’entrevoit à la Cité, elle passe sur les Champs-Élysées, elle surprend au Luxembourg ; on la regarde en oblique, et on dit « c’est elle ». Elle aurait été repérée à Montmartre, on s’y précipite. On met la télé, elle arrive sur le plateau, l’officiant se tait le temps qu’elle s’installe, qu’elle s’assied et qu’on l’ait applaudi. Tous veulent l’interroger, se coupent la parole, et au final, c’est le plus bête qui l’emporte. Mais qu’a-t-elle fait, que fait-elle aujourd’hui, Arfure, pour qu’on l’honore de la sorte ?

Rien. Elle a épousé un mari de trente ans d’âge, dont elle parle bien et souvent, qui jadis ministre, fait à présent du stand up dans quelque salle vers Strasbourg Saint-Denis.