Entre les éblouissements des sens, la mort danse éternellement autour de nous, à chacun de nos pas, comme une mystérieuse luciole trop familière pour nous captiver encore, sans que notre coeur, tout occupé qu’il est par les choses de la vie enchaînées à leur étrange cortège, la fixe un seul instant; protégée par une invisible défense immunitaire, qui seule donne goût à l’existence, notre conscience se consacre à nous faire vivre comme si ce train était sans fin.
Pourtant, une infinitésimale déchirure dans ce système suffit à nous plonger tout à coup dans un gouffre et voici quelqu’un, proche ou lointain, qui jusqu’à cet instant, marquait notre vie, soudainement à qui plus personne ne dira “tu”, happé à jamais par l’imparfait, déjà rongé par le souvenir comme sous un affreux lichen. Qui sait regarder cette mort en face sans blêmir, sans mourir un peu, qui sait le faire sans trop souffrir ni trop faiblir, sait forcément affronter tout de la vie, et s’en trouve ainsi plus vivant.
©hervéhulin2022